Saboteur est un jeu qui nous tient à cœur étant donné qu’il nous a mis le pied à l’étrier. C’est en effet le premier jeu que nous avons acheté, juste comme ça, pour voir ce que ça faisait de tester quelque-chose de nouveau, différent des fameux Monopoly ou Cluedo.
Au delà de ça, c’est un jeu qui a un potentiel énorme mais qui n’est pas utilisé à sa juste valeur. On le retrouve souvent en bout de rayon, parmi une multitude d’autres jeux de petit format et si l’on se contente de lire simplement les règles, on passe à côté du réel intérêt du jeu : le bluff. On va essayer de vous transmettre toutes les ficelles de ce jeu pour que vous puissiez en tirer partie 🙂
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3 à 10 joueurs |
À partir de 8 ans | |
Parties de 30min (selon la boîte) Parties de 45min (selon nous) |
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Par Frédéric Moyersoen | |
Illustré par Tomas Kucerovsky | |
Distribué par Gigamic |
Saboteur, le contexte
Chaque joueur incarne un nain mineur, qui, en collaboration avec les autres joueurs doit creuser des galeries pour trouver des pépites d’or. Cependant, certains de ces mineurs sont des saboteurs qui vont tout faire pour voir échouer la mission.
But du jeu
Vous l’aurez compris, le but du jeu est différent selon le rôle que vous occupez.
Si vous êtes un simple mineur, votre but est de trouver les pépites d’or en creusant tant bien que mal malgré les différentes entraves que vous pourrez rencontrer.
Si vous êtes un saboteur, votre but est d’empêcher les mineurs de trouver ces pépites en ralentissant au maximum leur progression.
Mise en place du jeu
La mise en place est relativement rapide. Le but est de matérialiser la mine avec les cartes de jeu. D’un côté l’échelle qui nous permet de rentrer dans la mine. De l’autre, trois cartes objectif face cachée qui abritent (seulement pour l’une d’entre elles) les fameuses pépites. Pour mettre les mineurs et saboteurs sur le même pied d’égalité, une certaine distance doit séparer l’échelle des trois autres cartes.
Une fois la mine en place, on distribue les rôles qui doivent rester secrets jusqu’à la fin de la partie.
Enfin, chaque joueur reçoit un certain nombre de cartes qui représentent des actions. Ce sont ces actions qui vont rythmer la partie.
Les cartes
Bien que beaucoup de cartes soient différentes, elles sont réparties en cinq types :
- Nouvelles galeries
Ces cartes vous permettent de prolonger la galerie et donc de creuser encore plus dans n’importe quel sens ! Certaines cartes sont des culs-de-sac et peuvent donc entraver l’avancée de l’équipe.
- Casses d’outils
Ces cartes, matérialisées par des ronds rouges vous permettent de casser les outils d’autres mineurs (pioche, lanterne ou wagon). Un mineur qui a au moins un outil cassé ne peut plus poser de nouvelle galerie ! Mais il peut encore jouer d’autres cartes action.
- Réparations d’outils
Ces cartes, matérialisées par des ronds verts vous permettent de réparer vos propres outils ou les outils d’autres mineurs. C’est LA carte qu’il faut pour vous serrer les coudes avec les autres membres de votre équipe.
- Visualisation du plan
Ces cartes vous permettent de retourner secrètement, au choix, une carte de destination afin que vous puissiez savoir où sont cachées les pépites.
- Éboulements
Les éboulements permettent de faire disparaître n’importe quelle carte déjà posée sur la table. Les mineurs peuvent s’en servir pour se débarrasser d’un cul-de-sac gênant posé par un saboteur. Les saboteurs peuvent s’en servir pour ébouler une partie de galerie, qu’il faudra remplacer avant de continuer.
Le déroulement du jeu
Après avoir déterminé quel joueur commence, celui-ci doit absolument jouer ou défausser une carte.
Le joueur peut donc continuer de creuser la galerie ou faire une action décrite dans la partie précédente.
S’il n’a rien de pertinent à jouer ou s’il ne souhaite rien jouer, il défausse l’une de ses cartes.
Une fois l’action réalisée, il récupère une carte dans la pioche et c’est au joueur suivant de jouer.
La manche prend fin lorsque les mineurs trouvent l’or (c’est à dire qu’ils ont gagné) ou jusqu’à ce que plus aucun joueur n’ai de carte à jouer (c’est à dire que les saboteurs ont gagné).
Si les mineurs gagnent, ils récupèrent un certain nombre de cartes « pépites d’or ».
Si les saboteurs gagnent, ils récupèrent chacun 3 pépites d’or.
La partie prend fin lorsque 3 manches ont été jouées et le joueur qui possède le plus grand nombre de pépites gagne.
Quel comportement adopter ?
C’est à vous de le définir. Cependant, en règle général, on observe souvent le même schéma :
En début de partie, les saboteurs essayent de passer inaperçu. Ils ne font pas de « gros coups », ne mettent pas de culs-de-sac, n’attaquent pas à tord et à travers. Ils se font juste passer pour des mineurs et mettent même parfois la main à la patte pour prouver leur bonne foi en montrant qu’ils contribuent à creuser la galerie et qu’ils sont donc des mineurs. Durant cette phase, chaque joueur observe le moindre fait et geste de chacun, comment il pose ses cartes, comment il réagit lors de l’utilisation d’une carte plan.
Au bout d’un moment, la galerie des mineurs est suffisamment grande pour inquiéter les saboteurs. Un saboteur décide d’entraver leur avancée (par un cul de sac ou un éboulement) et donc de se sacrifier pour le bien commun. Aucun doute pour les autres joueurs : il est saboteur.
C’est à ce moment là que la pose des cartes passe au second plan au profit du bagou des joueurs. Chacun ayant sa propre logique, se basant sur ses propres indices, essayant de convaincre les autres en prêchant la bonne parole. Le doute est d’autant plus fort que la répartition des rôles est faite pour que les joueurs ne sachent pas précisément combien de saboteurs ont pris place dans la partie.
Un jeu, deux niveaux
Ce qu’on aime avec Saboteur c’est qu’il y a deux niveaux implicites de jeu et que ces niveaux sont déterminés par les personnes avec qui vous jouez.
Le 1er niveau, c’est celui qui est dicté par les règles. D’apparence un jeu simple à mettre en place, auquel on peut jouer en famille sans prise de tête. Chacun joue son rôle : creuse ou entrave l’avancée de ses compagnons.
Le 2ème niveau, c’est celui auquel on goûte avec des joueurs plus expérimentés. Et c’est de loin notre préféré. Selon comment on joue les cartes, selon comment on se comporte, comment on divulgue l’information, comment on persuade les autres, le jeu prend une autre tournure, plus proche des Loups Garous de Thiercelieux que d’un simple jeu de cartes. Pour vous permettre de goûter à ce 2ème niveau, voici quelques astuces et stratégies que vous pouvez utiliser :
Le plan, une carte souvent mal jouée
C’est une partie qui me tient vraiment à cœur étant donné que « mal jouer » cette carte, c’est dire adieu à tout ce qui est intéressant dans ce jeu : le bluff. Selon les règles du jeu, le plan vous permet de regarder secrètement une des trois cartes d’arrivée afin que vous puissiez savoir (vous et vous uniquement) ce qu’il y a sous cette carte et donc si oui ou non vous allez tomber sur les pépites en la découvrant. Quel intérêt d’être seul à détenir cette information ? Vous pouvez vous sentir puissant certes, mais l’intérêt s’arrête là et votre action n’a aucune influence sur le jeu des autres joueurs.
De notre côté, nous demandons systématiquement au joueur qui joue un plan de nous dire ce qu’il a vu. Mais bien entendu, et vous pouvez lui rappeler en début de partie : il peut dire ce qu’il veut. Ainsi un mineur aura tendance a dire la vérité mais un saboteur cherchera peut-être à dire qu’il a vu un caillou alors qu’il a vu l’or. C’est votre jeu d’acteur qui rentre ici en jeu et le bouleverse totalement.
Le plan, dans les faits
Voici un cas de figure assez classique pour que vous puissiez comprendre :
- Un joueur n°1 (mineur) utilise son plan sur la carte n°1. Il dit qu’il a vu l’or.
- Juste après, un joueur n°2 (saboteur) utilise son plan sur cette même carte. Il dit que le joueur 1 ment, parce que sous cette carte il y a un caillou. Il l’accuse donc d’être un saboteur.
- Et encore juste après, un joueur n°3 (saboteur) utilise un plan sur cette même carte et vient confirmer ce que vient de dire le 2ème joueur.
- Les deux saboteurs se sont reconnus, ils savent qu’ils sont dans la même équipe. Ils éviteront donc de s’attaquer entre eux plus tard et se répareront peut-être même leurs outils.
- Les deux saboteurs passent pour des personnes de bonne foi, des mineurs.
- Le mineur est décrédibilisé et passe pour un saboteur.
- Les joueurs vont surement viser les cartes 2 et 3 et délaisser la 1 étant donné qu’apparemment il n’y a rien.
Bien entendu, ce cas de figure est favorable aux saboteurs, mais si ça avait été le cas inverse (2 mineurs contre 1 saboteur), le saboteur aurait été découvert et la suite de la partie aurait été compliquée pour lui. C’est à chacun de prendre des risques en ayant pris connaissances des dangers éventuels pour mener son équipe vers la victoire.
Quelle carte objectif vérifier en premier ?
Beaucoup de joueurs avec qui nous avons joué commencent toujours par vérifier la carte objectif du milieu. En réalité, c’est le pire choix à faire. Si vous tombez sur un caillou (ce qui arrivera dans 66% des cas), votre action n’aura servi à rien. L’équipe ne peut éliminer aucune direction et se contente de continuer à creuser au milieu étant donné que l’or pourrait être soit en haut, soit en bas. Une bonne pratique pour tout mineur qui se respecte est de vérifier une des deux cartes extérieures. Si vous tombez sur un caillou, vous pourrez éliminer une direction et vous concentrer sur les deux autres cartes, qui sont à côté. Si vous tombez sur l’or, c’est jackpot.
Creuser intelligemment
Ici on va parler d’une notion un peu plus pointue mais essentielle pour les mineurs s’ils veulent s’en sortir face à des saboteurs aux dents longues : la façon de jouer ses cartes galerie.
Le but du jeu, pour un mineur, est de partir de l’échelle pour creuser vers la droite, vers l’or. Sans aucune information précise sur l’emplacement de l’or, il est inutile de viser une carte but plutôt qu’une autre. Il faut donc creuser tout droit pour viser celle du milieu. Si jamais ce n’est pas la bonne, il manquera une ou deux cartes pour atteindre soit la carte du haut, soit la carte du bas. Si on avait visé la carte du haut et que finalement l’or est en bas, cela s’avérera forcément plus compliqué.
Par conséquent, un mineur ne doit jamais s’éloigner de la galerie principale. Pas de bifurcation parce qu’il « pense que l’or est en haut », pas de virages inutiles, pas de dédoublement de chemin. Un mineur qui joue de la sorte sans raison précise a de bonnes raisons d’être considéré comme suspect.
Creuser ou défausser ?
Au delà de ça, quand on est mineur, on est parfois contraint de défausser une carte, parce que nous n’avons rien à jouer. C’est assez mal vu. Rares sont les joueurs qui ne peuvent rien faire, rien creuser. Mais ça arrive. Au lieu de défausser, pour prouver votre bonne foi, une bonne pratique est de creuser un cul-de-sac à gauche de l’échelle d’entrée de la mine. Situé à gauche, ce cul-de-sac n’entrave en rien la progression des mineurs et surtout leur montre que vous vous êtes débarrassé d’un cul-de-sac alors que si vous étiez saboteur il aurait pu être redoutable. Vous n’êtes donc surement pas saboteur.
Ne pas être égoïste
Concernant la réparation d’outils, il peut être tentant d’utiliser une carte pour se réparer soi-même plutôt que de réparer un compatriote. Mais dans la majorité des cas, réparer un compatriote est plus intéressant.
Si vous vous réparez personnellement, vous attendrez un tour complet avant de jouer. Un tour pendant lequel n’importe quel joueur peut à nouveau vous briser un outil.
Si vous réparez un compatriote qui joue immédiatement après vous, il peut creuser sur le champ et donc vous faire avancer.
Compter les cartes
Avec l’habitude, on en vient naturellement à compter les cartes du jeu pour déterminer les actions futures possibles. En effet, il est très courant que les mineurs soient dans une situation délicate qui ne peut être résolue que par une seule et unique carte. Par exemple lorsque le seul mineur qui a les cartes pour atteindre l’or a une pioche cassée, seule une réparation de pioche peut sauver la partie. Ou alors lorsque la galerie a été éboulée par les saboteurs et que seule une galerie en forme de croix peut remplacer la carte. Le comptage des cartes « clé » du jeu peut vous aider à prendre telle ou telle décision à un instant T. Savoir que le jeu comporte 3 éboulements, 2 réparations par outil, 5 chemins en forme de croix est important pour des habitués.
Jouer avec un nain égoïste
Selon le nombre de joueurs, il peut arriver qu’une équipe soit avantagée par rapport à l’autre. Lorsque les mineurs ont l’avantage (dans une partie à 6 joueurs par exemple), une astuce consiste à jouer avec le nain égoïste. Parmi les cartes rôles distribuées, mettez vous simplement d’accord sur le fait que le nain qui a une veste rouge (par exemple) est le nain égoïste. Ce nain est un mineur comme les autres : son but est de trouver l’or. Il fait donc partir de l’équipe des mineurs et doit lutter contre les saboteurs. Cependant, si jamais les mineurs gagnent et que ce n’est pas lui qui découvre l’or, il ne gagne rien. Par contre, s’il trouve l’or, il récupère tout pour lui et les autres nains ne gagnent rien.
Dans les faits, il va donc faire partie de l’équipe des mineurs pendant les 3/4 de la partie. Cependant, quand l’or est sur le point d’être découvert, il montre son vrai visage en arrêtant de creuser voire même en cassant les outils de ses compatriotes afin d’être sûr d’être celui qui posera la dernière carte. Ceci ralenti assez nettement la progression des mineurs, de quoi avoir un jeu équilibré.
Du bluff, du bluff et encore du bluff
C’est un jeu de bluff, alors bluffez. Tout le jeu va reposer là dessus. Il n’y a pas de limite. Brisez ponctuellement l’outil d’un saboteur alors que vous l’êtes aussi pour vous faire passer pour un mineur. Creusez un peu pour vous faire passer pour un mineur. Prétendez avoir beaucoup de galeries intéressantes pour que les saboteurs vous brisent vos outils, alors que vous n’avez rien. Essayez de vous imposer comme leader de l’équipe des mineurs alors que vous êtes saboteur. Menez une véritable stratégie de bluff. Pensez-y dès le début de partie et tout le monde pourra potentiellement croire en vous.
En bref
Saboteur est un jeu dont on ne se lasse jamais. Nous l’avons depuis prêt de 10 ans et nous prenons toujours autant de plaisir avec. C’est un bon jeu pour faire découvrir le bluff à des personnes qui y sont réticentes. Il nous a été difficile de faire adhérer des amis aux Loups Garous de Thiercelieux par exemple étant donné qu’ils ne savaient pas sur quoi se baser pour décider si cette personne était oui ou non un loup garou. Comment le savoir ? Saboteur répond à cette question grâce aux cartes. Chaque joueur peut-être jugé en fonction de ce qu’il dépose sur le table mais a tout de même la possibilité de changer les choses grâce à son bagou. Chacun y trouve son compte et personne ne semble perdu.
Notre avis sur Saboteur
On aime | On aime moins |
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Le format compact du jeu | L’espace nécessaire pour jouer : il faut jouer sur une grande table vide, donc oubliez ce jeu pendant l’apéro |
Les différents niveaux de jeux possibles : en famille ou avec des joueurs plus expérimentés | Jouable mais pas très intéressant avec moins de 5 joueurs |
Le nombre de joueurs possible : 3 à 10 joueurs, rares sont les jeux avec un éventail aussi large | |
Le bluff qui fait tout le charme du jeu | |
Notre note : 8/10 |
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